« Noël, sa vie est ancrée ici comme « l’éléphant », ce gros rocher debout sur le port de Jean-Bart »
« Quand les bateaux rentraient, avec Djelloul on dégringolait les escaliers jusqu'au flanc du pointu couché sur le sable pour contempler dans les filets les bacorettes frétillantes. On en prenait une dans chaque main en glissant deux doigts dans les ouïes. Nos bras lestés de trois kilos brandissaient les trophées, comme Marcel les bartavelles »
« C’est foutu ! David a le pressentiment que tout va basculer, que la nuit va engloutir ce décor, son enfance, que le monde dans lequel il a grandi est condamné à disparaître, que le présent glisse sans prévenir vers les souvenirs »
« L'espace de quelques instants, comme un flash dans le hublot, les falaises de Jean-Bart et, juste devant, l’île Sandja, l’île des gourmandises de l’été avec sa falaise d’un côté,
sa plage de l’autre qu’on rejoignait à la rame... Elle résiste à tout. En 42, les avions allemands et italiens l'avaient bombardée la prenant du ciel pour un porte-avions »
« Dernier bout d’Afrique avant de basculer de l’autre côté de la mer. Les tympans de David sont au bord de l’implosion.
Le temps des regrets, de la nostalgie commence, de quelque chose qui met toujours hors de tout, l’exil, et pire, la privation de liberté »
« Incroyable ! La caserne Thoiras est le premier bâtiment sur la droite à l’entrée de la cité. Un mirador se dresse posé sur un haut mur aveugle surligné de barbelés.
Saint Martin de Ré l’estivale, cache une autre réalité, moins brillante, plus sombre : la prison. Drôle d’accueil pour les vacanciers ! Ministère de la Justice : Une pancarte barrée des couleurs tricolores se fait toute petite.
Quand les trente détenus débarquent : le silence »
« Accolés aux bâtiments administratifs, un sas d’entrée à ciel ouvert et un chemin de ronde au milieu de la double enceinte. Puis une grande bâtisse blanche de quatre étages, sans doute une construction récente, que les « anciens », arrivés en mai, ont baptisé HLG (Habitations à Loyer Gratuit). »
« Le clocher de l’église a disparu dans la nuit, les flonflons de la fête ont repris, ponctués toutes les quinze minutes par le bing bing de la cloche, comme pour rappeler qu’en prison chaque moment est décortiqué. La lente, l’impitoyable fuite des heures. »
« Trente degrés de moyenne dans la journée ! La température rappelle celle de la Kabylie au mois d’août, l’humidité en plus. Kourou est une ville grouillante, incroyable diversité de couleurs de peau, de regards qui se croisent sur les échafaudages.
Dans cette tiédeur lourde et permanente de l’air aux brusques averses diluviennes les bagarres sont monnaie courante… Mais ici, casse pas la tête, apré lapli, sébotan… Le soleil reprend vite ses droits et finit toujours par montrer le bout du nez. »